24 fois la vérité / Raphaël Metz

Que l’on soit passionné d’histoire du cinéma ou pas du tout, que cette douce couverture un brin naïve nous laisse perplexe ou nous intrigue, on ne pourra rester indifférente(e) devant ce texte: il est question de traces, d’images, et de transmission, dans tous les sens du terme.

« La photographie, c’est la vérité, le cinéma, c’est 24 fois la vérité par seconde » (Le Petit soldat, Godard, 1961)

C’est ainsi qu’en 24 chapitres, Adrien, le narrateur, alterne récit de sa vie de journaliste pigiste du XXIème siècle aux prises avec les maux de l’image et du numérique, et récit de la vie de son grand-père Gabriel, opérateur de prises de vue. Né en 1908, mort en 2009, l’aïeul aura donc traversé la totalité du XXème siècle, un œil derrière toutes sortes de caméras, témoin de l’histoire. Le premier et le dernier chapitre se répondent avec pour fil rouge cette première caméra Pathé-Kok grand public 1913, tenue d’abord par sa grande sœur Hélène, morte accidentellement à l’âge de 11 ans… Au-delà de l’histoire du cinéma et de la grande Histoire, le texte déploie la thématique de la perte et du deuil impossible de cette sœur qui n’a rien su du siècle. En parallèle de cet axe sensible, d’irrésistibles réflexions existentielles et drôlatiques discussions entre amis jalonnent le quotidien de notre journaliste en quête de sens. Car oui, filmer un événement, est ce vraiment le vivre? Les derniers chapitres sont extrêmement intenses, d’une justesse remarquable, donnant aussi tout son sens à l’illustration de couverture.

Gabriel et Adrien sont-ils totalement fictifs? Aucune idée, et peu importe. La vérité qui s’en dégage – 24 fois et plus…- offre un puissant vertige.

Le Tripode, 2021.

Ewa B. (Bibliothèques de Rennes)

Ce document a également été évoqué lors du groupe de lecture “Des Livres et vous” (Bruz), en voici les avis des membres :

L’avis de Sophie G.

Adrien, son petit-fils, nous donne à voir ici ce grand-père attachant qui évolue dans le milieu balbutiant et prometteur du cinéma. Il met en scène sa propre vie sans saveur, désenchantée et triste tant elle semble happée par la frénésie des avancées numériques, les réseaux sociaux et les nouvelles technologies. Roman dense, inventif qui fourmille de détails passionnants sur l’histoire du cinéma. Entre Gabriel et Adrien, on oscille entre deux époques, deux visions, deux mondes.
Une belle réflexion sur la filiation mais aussi la place de l’image et du rapport à l’écriture et à la création. Réjouissant.

L’avis de Claire L.

Adrien, journaliste lassé de vanter les mérites des nouvelles technologies, veut écrire un roman sur son grand-père Gabriel, opérateur de cinéma, et il a raison ! Quelle vie, entre la France et le Mexique, que de rencontres et de heureux hasards ! Une vie romanesque et passionnante.
Quant à ses enquêtes, de salons high tech en essais de matériels, Adrien nous les narre de façon franchement drôle. Ses rencontres avec des amis qui monologuent en sa présence sont parfois plus laborieuses mais pas sans effet comique. Et toujours, l’occasion de réflexions intéressantes sur le cinéma, le réel et la technique et ses évolutions d’un siècle à l’autre.
Original et bien écrit, un parcours dans l’Histoire du XXè siècle à lire assurément !!

L’avis d’Annie H.

Le récit concernant Gabriel m’a littéralement passionnée. De par son métier, il a couvert de nombreux événements importants du XXè siècle dont l’assassinat du roi de Yougoslavie en 1934 ou la libération du camp de Dachau en 1945. On suit en même temps l’évolution prodigieuse du matériel de prise de vue. Les thématiques d’absence et de deuil sont abordées avec tact.
Les chapitres concernant Adrien m’ont paru parfois un peu trop longs et touffus, mais globalement ce livre est à lire.


A retrouver (entre autres) dans les Bibliothèques de Rennes et à la Médiathèque de Bruz

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